Rainbow City Records / UK Decay Records
2013
2013
Je
l'avoue, je le confesse. Bien qu'étant un grand fan du vieux UK DECAY
depuis ma découverte du groupe en 1988, je n'avais guère été convaincu,
début 2013, par le premier trailer annonçant un nouvel album, lequel
allait sortir en mai de la même année. Une compilation de courts
extraits mal choisis m'avait induit en erreur en me laissant présager, à
tort, que la nouvelle cuvée de UK DECAY s'avérerait décevante, et qu'on
aurait peine à y reconnaître le vieux groupe culte qu'on avait tant
aimé naguère. Fort de cette première impression faussée, j'avais donc
boudé, littéralement ignoré l'album depuis sa sortie jusqu'à une date très récente, persuadé qu'il n'était porteur d' aucune bonne surprise. Je craignais qu'au contraire il témoignerait à coup sûr d'un piteux naufrage, lequel allait fatalement engloutir le mythe corps et biens. Il me faut bien l'admettre, à présent : ce fut une lourde erreur de ma part que d'être passé si longuement à côté de ce petit chef d'oeuvre, digne successeur du monumental LP "For Madmen Only" de 1981.
Ce sont exactement trente-deux ans après ce premier album longue durée que "New Hope for the Dead", sa suite très attendue et longtemps restée inespérée, voit donc enfin le jour, sous l'égide d'un groupe reformé et visiblement revigoré. On sent ici bien plus qu'une simple résurrection, au contraire de tant de dinosaures musicaux qui se sont reformés ces dernières années, et qui se contentent de surfer sur une certaine vague nostalgique; l'énergie, la conviction et l'inspiration créatrice en moins. Dans le cas particulier de UK DECAY, il convient davantage de parler de renaissance, puisqu'en fait, c'est bel et bien le groupe que l'on avait gardé en mémoire qui nous revient. Qui plus est au meilleur de sa forme. Mais justement, avant d'entrer dans le vif du sujet, parlons-en un peu, de sa forme.
Les premiers pressages CD et LP (vinyl) de "New Hope for the Dead" nous parviennent en effet présentés dans une pochette gatefold à la texture particulière, qui lui donne à la fois un aspect et un toucher hors du commun. L'effet visuel obtenu, en 3D, reproduit l'éclat d'une peinture à l'huile et/ou vernie, coups de pinceaux et apparence luisante y compris. Cette technique graphique constitue une première mondiale en matière d'artwork pour supports musicaux. On pourra néanmoins déplorer que cet artwork, reproduisant de façon austère et minimaliste - pour ne pas dire sommaire - les lignes des drapeaux états-unien et britannique en noir brillant sur noir mat, soit tout sauf explicite. Reproductions d'oeuvres d'un artiste dénommé Franko B, elles ne laissent apparaitre nulle part le nom du groupe et le titre de l'album, que l'on ne peut découvrir qu'en ouvrant la pochette gatefold... Seul un petit autocollant discoïdal apposé sur le blister de cellophane qui enveloppe les exemplaires neufs annonce laconiquement "UK Decay - New Hope for the Dead". Une façon, sans doute, d'éviter un échec commercial complet par simple manque de visibilité. L'objet en lui-même n'est pas aisément identifiable au premier coup d'oeil, et semble ne s'adresser qu'à une caste restreinte d'initiés. Mais après tout, cela ne résulte-t-il pas d'un choix délibéré de la part de UK DECAY, artistes sombre s'adressant de facto à une sorte d'élite noire ? C'est à voir.
Côté sonore, les inquiets et autres sceptiques qui attendaient le groupe au tournant, et qui à vrai dire redoutaient presque tous le pire, en seront pour leurs frais. Dès le splendide premier morceau qui ouvre l'album, "Shake 'em up", on se retrouve immédiatement téléportés là où UK DECAY nous avait laissés en 1983, comme si cette toute nouvelle composition avait été enregistrée au lendemain de la sortie du live sur cassette audio "A Night For Celebration". Une excellente surprise est que l'on retrouve, outre le son caractéristique du combo historique, la voix du chanteur Abbo, aux accents tragiques et aux tonalités si particulières, qui nous revient absolument inchangée. On retrouve là tous les ingrédients qui ont ensemble contribué à forger l'âme unique de UK DECAY, et qui ont propulsé jadis le quatuor au rang de référence quasi-légendaire du Punk sombre et du Post-Punk à tendance gothique ou Batcave. L'identité musicale du groupe originel est donc pleinement respectée et restituée, pour le plus grand soulagement - ou à la grande surprise - de tous ceux et toutes celles qui n'en attendaient pas tant.
Le morceau suivant, au curieux titre de "Heavy Metal Jews", et dont les paroles déplorent "l'antisémitisme ambiant" - l'ensemble des juifs ne devant pas être tenu collectivement responsable de la politique de l' "Etat d'Israël" - confirme ce brillant retour aux sources musicales, mais en y ajoutant cette fois une pointe de son moderne, assez puissant. Le troisième titre "Next Generation ????" s'aventure quant à lui sur des terres inattendues, lesquelles ne sont pas sans rappeler les expérimentations post-punks du BLACK FLAG de la période des albums "In My Head" et "Loose Nut". Essai fort réussi. Mais le plus surprenant arrive avec le morceau "Killer", dont le texte vise très explicitement l'impérialisme agressif des USA, et dont le son de la musique comme des vocaux reflète une modernité auquel le groupe ne nous avait jamais habitués jusqu'à présent. Si cela peut quelque peu dérouter de prime abord, une ou deux écoutes supplémentaires permettront d'apprécier l'exercice à sa juste valeur. Passé l'effet de surprise, on remarquera qu'en réalité la "patte" de UK DECAY marque bien l'ensemble, tout en s'ajoutant à quelque chose de neuf. C'est d'ailleurs cette chanson, emblématique d'une certaine volonté d'explorer des sonorités à la fois plus dures et plus techniques, qui figure aussi en face A du single tiré de l'album, même si l'on peut regretter ce choix qui n'est pas véritablement représentatif de l'ensemble du disque.
Dans la série des incontournables petits joyaux que recèle "New Hope for the Dead", il serait indécent de ne pas mentionner également des morceaux aussi remarquables que "This City is a Cage" ou "Revolutionary Love Song", qui font tant honneur au UK DECAY originel qu'ils méritent, à l'instar de ceux qui ont été précédemment cités, de figurer dans son anthologie discographique. Le reste du disque se partage entre surprenante expérimentation à la limite entre Blues et Disco ("Woman with a Black Heart"), expérimentation bizarroïde au son froid et synthétique, plus scandée que chantée et dépourvue de rythmique ("Shout"), une sorte de ballade popisante à l'instrumentation minimaliste voire presque acoustique ("All the Faces in History"), et une efficace incursion sur le terrain d'un pop-rock puissant matiné d'une touche post-punk qui fleure bon l'âge d'or du style, répondant au titre sombrement ironique "I feel good".
Il se referme sur le sépulcral "Drink", sorte de requiem quasi-incantatoire sur une orchestration mêlant orgue d'église et complaintes de violon mélancolique. Une prière funèbre qui vient superbement clore un nouvel opus dont on regrette déjà qu'il soit si court, après plus de trente ans d'attente...
On l'aura donc compris, à la lecture des quelques lignes descriptives qui précèdent : si, en matière de musique, les bonnes surprises se font hélas désespérément rares aujourd'hui, surtout de la part de gloires du passé dont le retour s'avère souvent au mieux honorable et au pire très décevant, le retour de UK DECAY s'inscrit indéniablement, avec "New Hope for the Dead", au nombre plus restreint encore des divines surprises. Pour des raisons d'ordre affectif tout autant que par pure objectivité, il sera bien évidemment difficile de déloger le légendaire "For Madmen Only" de la plus haute marche du podium, qu'il semble devoir occuper pour l'éternité. Néanmoins, il ne semble pas exagéré d'avancer que "New Hope for the Dead" peut se classer à peine une ou deux marches en dessous... Autant dire qu'il s'agit véritablement d'un bon, d'un très bon, et même d'un excellent disque, de ceux qui ont l'étonnante faculté de faire remonter le temps sans être en décalage ni même en rupture totale avec les sons actuels.
Avec sept à huit titres sur onze qui soutiennent aisément la comparaison avec les grands classiques du groupe, et dont cinq ou six sont seraient carrément dignes de figurer sur une compilation d'anthologie de type "best of", "New Hope for the Dead" nous démontre avec éclat qu'il est encore possible aujourd'hui, pour notre plus grand bonheur, d'avoir droit à du grand UK DECAY totalement nouveau et inédit. Saluons comme il se doit le retour triomphal de ces grands anciens qui firent jadis leurs premières armes aux côtés des BAUHAUS, PLAY DEAD, KILLING JOKE, JOY DIVISION, 1919, THE WALL et autres SOUTHERN DEATH CULT, et qui sont depuis toujours restés d'incontournables légendes. Le tout premier groupe, à en croire le chanteur Abbo, à avoir employé le terme de "gothique" pour définir sa musique, dans le cadre d'une interview à l'aube des années 80.
Si vous appréciez la "grande époque" du groupe, sachez donc que vous pouvez vous jeter sans appréhension aucune, les yeux fermés, sur cette somptueuse petite merveille malencontreusement passée inaperçue sous nos cieux. Foi de blogueur, de fanzineux et de chroniqueur ayant acquis un semblant d'expérience au fil des années, je puis vous garantir que vous ne le regretterez pas.
Hans
boudé, littéralement ignoré l'album depuis sa sortie jusqu'à une date très récente, persuadé qu'il n'était porteur d' aucune bonne surprise. Je craignais qu'au contraire il témoignerait à coup sûr d'un piteux naufrage, lequel allait fatalement engloutir le mythe corps et biens. Il me faut bien l'admettre, à présent : ce fut une lourde erreur de ma part que d'être passé si longuement à côté de ce petit chef d'oeuvre, digne successeur du monumental LP "For Madmen Only" de 1981.
Ce sont exactement trente-deux ans après ce premier album longue durée que "New Hope for the Dead", sa suite très attendue et longtemps restée inespérée, voit donc enfin le jour, sous l'égide d'un groupe reformé et visiblement revigoré. On sent ici bien plus qu'une simple résurrection, au contraire de tant de dinosaures musicaux qui se sont reformés ces dernières années, et qui se contentent de surfer sur une certaine vague nostalgique; l'énergie, la conviction et l'inspiration créatrice en moins. Dans le cas particulier de UK DECAY, il convient davantage de parler de renaissance, puisqu'en fait, c'est bel et bien le groupe que l'on avait gardé en mémoire qui nous revient. Qui plus est au meilleur de sa forme. Mais justement, avant d'entrer dans le vif du sujet, parlons-en un peu, de sa forme.
Les premiers pressages CD et LP (vinyl) de "New Hope for the Dead" nous parviennent en effet présentés dans une pochette gatefold à la texture particulière, qui lui donne à la fois un aspect et un toucher hors du commun. L'effet visuel obtenu, en 3D, reproduit l'éclat d'une peinture à l'huile et/ou vernie, coups de pinceaux et apparence luisante y compris. Cette technique graphique constitue une première mondiale en matière d'artwork pour supports musicaux. On pourra néanmoins déplorer que cet artwork, reproduisant de façon austère et minimaliste - pour ne pas dire sommaire - les lignes des drapeaux états-unien et britannique en noir brillant sur noir mat, soit tout sauf explicite. Reproductions d'oeuvres d'un artiste dénommé Franko B, elles ne laissent apparaitre nulle part le nom du groupe et le titre de l'album, que l'on ne peut découvrir qu'en ouvrant la pochette gatefold... Seul un petit autocollant discoïdal apposé sur le blister de cellophane qui enveloppe les exemplaires neufs annonce laconiquement "UK Decay - New Hope for the Dead". Une façon, sans doute, d'éviter un échec commercial complet par simple manque de visibilité. L'objet en lui-même n'est pas aisément identifiable au premier coup d'oeil, et semble ne s'adresser qu'à une caste restreinte d'initiés. Mais après tout, cela ne résulte-t-il pas d'un choix délibéré de la part de UK DECAY, artistes sombre s'adressant de facto à une sorte d'élite noire ? C'est à voir.
Côté sonore, les inquiets et autres sceptiques qui attendaient le groupe au tournant, et qui à vrai dire redoutaient presque tous le pire, en seront pour leurs frais. Dès le splendide premier morceau qui ouvre l'album, "Shake 'em up", on se retrouve immédiatement téléportés là où UK DECAY nous avait laissés en 1983, comme si cette toute nouvelle composition avait été enregistrée au lendemain de la sortie du live sur cassette audio "A Night For Celebration". Une excellente surprise est que l'on retrouve, outre le son caractéristique du combo historique, la voix du chanteur Abbo, aux accents tragiques et aux tonalités si particulières, qui nous revient absolument inchangée. On retrouve là tous les ingrédients qui ont ensemble contribué à forger l'âme unique de UK DECAY, et qui ont propulsé jadis le quatuor au rang de référence quasi-légendaire du Punk sombre et du Post-Punk à tendance gothique ou Batcave. L'identité musicale du groupe originel est donc pleinement respectée et restituée, pour le plus grand soulagement - ou à la grande surprise - de tous ceux et toutes celles qui n'en attendaient pas tant.
Le morceau suivant, au curieux titre de "Heavy Metal Jews", et dont les paroles déplorent "l'antisémitisme ambiant" - l'ensemble des juifs ne devant pas être tenu collectivement responsable de la politique de l' "Etat d'Israël" - confirme ce brillant retour aux sources musicales, mais en y ajoutant cette fois une pointe de son moderne, assez puissant. Le troisième titre "Next Generation ????" s'aventure quant à lui sur des terres inattendues, lesquelles ne sont pas sans rappeler les expérimentations post-punks du BLACK FLAG de la période des albums "In My Head" et "Loose Nut". Essai fort réussi. Mais le plus surprenant arrive avec le morceau "Killer", dont le texte vise très explicitement l'impérialisme agressif des USA, et dont le son de la musique comme des vocaux reflète une modernité auquel le groupe ne nous avait jamais habitués jusqu'à présent. Si cela peut quelque peu dérouter de prime abord, une ou deux écoutes supplémentaires permettront d'apprécier l'exercice à sa juste valeur. Passé l'effet de surprise, on remarquera qu'en réalité la "patte" de UK DECAY marque bien l'ensemble, tout en s'ajoutant à quelque chose de neuf. C'est d'ailleurs cette chanson, emblématique d'une certaine volonté d'explorer des sonorités à la fois plus dures et plus techniques, qui figure aussi en face A du single tiré de l'album, même si l'on peut regretter ce choix qui n'est pas véritablement représentatif de l'ensemble du disque.
Dans la série des incontournables petits joyaux que recèle "New Hope for the Dead", il serait indécent de ne pas mentionner également des morceaux aussi remarquables que "This City is a Cage" ou "Revolutionary Love Song", qui font tant honneur au UK DECAY originel qu'ils méritent, à l'instar de ceux qui ont été précédemment cités, de figurer dans son anthologie discographique. Le reste du disque se partage entre surprenante expérimentation à la limite entre Blues et Disco ("Woman with a Black Heart"), expérimentation bizarroïde au son froid et synthétique, plus scandée que chantée et dépourvue de rythmique ("Shout"), une sorte de ballade popisante à l'instrumentation minimaliste voire presque acoustique ("All the Faces in History"), et une efficace incursion sur le terrain d'un pop-rock puissant matiné d'une touche post-punk qui fleure bon l'âge d'or du style, répondant au titre sombrement ironique "I feel good".
Il se referme sur le sépulcral "Drink", sorte de requiem quasi-incantatoire sur une orchestration mêlant orgue d'église et complaintes de violon mélancolique. Une prière funèbre qui vient superbement clore un nouvel opus dont on regrette déjà qu'il soit si court, après plus de trente ans d'attente...
On l'aura donc compris, à la lecture des quelques lignes descriptives qui précèdent : si, en matière de musique, les bonnes surprises se font hélas désespérément rares aujourd'hui, surtout de la part de gloires du passé dont le retour s'avère souvent au mieux honorable et au pire très décevant, le retour de UK DECAY s'inscrit indéniablement, avec "New Hope for the Dead", au nombre plus restreint encore des divines surprises. Pour des raisons d'ordre affectif tout autant que par pure objectivité, il sera bien évidemment difficile de déloger le légendaire "For Madmen Only" de la plus haute marche du podium, qu'il semble devoir occuper pour l'éternité. Néanmoins, il ne semble pas exagéré d'avancer que "New Hope for the Dead" peut se classer à peine une ou deux marches en dessous... Autant dire qu'il s'agit véritablement d'un bon, d'un très bon, et même d'un excellent disque, de ceux qui ont l'étonnante faculté de faire remonter le temps sans être en décalage ni même en rupture totale avec les sons actuels.
Avec sept à huit titres sur onze qui soutiennent aisément la comparaison avec les grands classiques du groupe, et dont cinq ou six sont seraient carrément dignes de figurer sur une compilation d'anthologie de type "best of", "New Hope for the Dead" nous démontre avec éclat qu'il est encore possible aujourd'hui, pour notre plus grand bonheur, d'avoir droit à du grand UK DECAY totalement nouveau et inédit. Saluons comme il se doit le retour triomphal de ces grands anciens qui firent jadis leurs premières armes aux côtés des BAUHAUS, PLAY DEAD, KILLING JOKE, JOY DIVISION, 1919, THE WALL et autres SOUTHERN DEATH CULT, et qui sont depuis toujours restés d'incontournables légendes. Le tout premier groupe, à en croire le chanteur Abbo, à avoir employé le terme de "gothique" pour définir sa musique, dans le cadre d'une interview à l'aube des années 80.
Si vous appréciez la "grande époque" du groupe, sachez donc que vous pouvez vous jeter sans appréhension aucune, les yeux fermés, sur cette somptueuse petite merveille malencontreusement passée inaperçue sous nos cieux. Foi de blogueur, de fanzineux et de chroniqueur ayant acquis un semblant d'expérience au fil des années, je puis vous garantir que vous ne le regretterez pas.
Hans
TRACKLIST :
1. Shake 'Em Up
2. Heavy Metal Jews
3. Next Generation ????
4. Killer
5. This City Is A Cage
6. Woman With A Black Heart
7. Revolutionary Love Song
8. Shout
9. All The Faces In History
10. I Feel Good
11. Drink
UK DECAY : Shake 'em up
UK DECAY : This City is a Cage
UK DECAY : Revolutionary Love Song
UK DECAY : Killer
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